mercredi 8 juillet 2015

La Grèce ou l'échec de l'Europe comptable





La zone euro est depuis le départ une création atypique. Il s’agit d’une union sans fédéralisme ou du moins avec une seule institution fédérale, la Banque centrale européenne dont l’indépendance a été reconnue par le Traité de Maastricht.


Pour éviter une utilisation abusive de la monnaie, des garde-fous ont été institués sous forme de règles à respecter, déficit, dette, inflation, balance des paiements. Il a été admis qu’en cas de choc conjoncturel, les règles pouvaient être adaptées. Cet assouplissement a été demandé rapidement par l’Allemagne qui devait financer la réunification suivie de peu par la France.

En cas de choc asymétrique au sein de la zone euro, les Etats n’ont pas d’autres possibilités que de jouer sur des paramètres intérieurs et pratiquer ce que l’on appelle de la dévaluation interne, baisse du coût du travail avec comme objectif le respect des règles. Il n’y a pas de dispositifs fédéraux pouvant compenser tout ou partie les efforts de remise en ordre. Le budget de l’Union européenne ne représente que 1 % du PIB.

La Grèce a des torts dans la crise mais pouvait-elle s’en sortir compte tenu des modalités actuelles de fonctionnement de la zone euro ? Le pays qui est faiblement peuplé et qui dispose d’une économie peu diversifiée ne pouvait pas gagner des parts de marchés suffisantes à l’exportation pour engranger des capitaux. Le secteur touristique procure des recettes trop faibles et trop saisonnières pour permettre de rembourser les dettes accumulées.

L’Allemagne a accepté la monnaie unique sans en accepter les conséquences, la mutualisation des avantages et des inconvénients. L’application de règles ne suffit pas à créer des économies prospères et vertueuses.

Sans fonds d’investissement, sans transfert financier, il n’est pas possible de traiter des chocs de grande ampleur qui frappe un Etat ou quelques Etats au sein de l’Union. En France, il y a eu des plans pour favoriser le développement de la Bretagne ou de la Corse. Il y a eu dans le passé le plan du grand Sud Ouest qui a contribué à placer cette région parmi les plus dynamiques de France.

Les Européens sont prêts à perdre un peu plus de 300 milliards d’euros de peur d’en perdre encore plus demain. Mais, pourquoi ne pas imaginer un plan de financement sur le modèle du plan Marshall qui a permis après la Seconde Guerre Mondiale de reconstruire l’Europe qui a l’époque était exsangue ? Les entreprises françaises, allemandes, italiennes, belges… auraient profité des travaux réalisés en Grèce.

L’affaire grecque est de part et d’autre la preuve que l’égoïsme et le populisme sont réellement de retour en Europe. Cette affaire est porteuse de désillusion. En effet, si nous ne sommes pas capables de sauver le soldat grec qui pèse moins de 3 % du PIB de la zone euro, comment pourrons sauver un autre soldat bien plus imposant.



L’opinion publique manipulée par les gouvernements considère que l’Europe, l’euro est responsable de tous leurs maux. La population allemande ne veut plus payer pour les Grecs tout en oubliant que ces derniers ont contribué à la croissance de leur pays ces dernières années. Demain, en vertu de quoi, cette population ou celle d’un autre Etat voudra payer pour un autre pays ? Nul ne peut ignorer qu’il y aura demain, après-demain d’autres crises, qu’un autre Etat rencontrera des difficultés. Il y aura d’autres gouvernements qui essaieront de maquiller leurs chiffres. Faudra-t-il les exclure ?





La sortie de la Grèce pourrait sonner le glas d’une certaine vision de l’Europe. Cela serait la porte ouverte à tous les populismes et donnerait raisons à tous les extrémismes.

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