vendredi 4 mai 2012

Quel ministre de l'Economie pour quels enjeux après le 6 mai ?


Jusqu’au 17 juin, la France est sous anesthésie. Durant un semestre, les décisions importantes sont mises sous le tapis. En 2007, une petite erreur de communication sur la TVA a failli entrainer la défaite de l’UMP. En 2012, les acteurs politiques, échaudés par le précédent, seront évités de renouveler un tel impair. Certes, la Belgique a prouvé qu’un pays pouvait se passer d’un exécutif durant plus d’un an. L’absence de pouvoir est certainement moins dangereuse qu’un combat pour le pouvoir qui donne lieu à une surenchère de promesses dépensières.

Par souci de rationalité et d’économies, un jumelage des deux élections phares serait bienvenu. Elire à la fois le Président de la République et les députés simplifierait le calendrier et ferait gagner un mois.

Après le temps des joutes électorales, en plein été, le pouvoir exécutif devra affronter la réalité du terrain. Dans le domaine économique, la question de l’emploi sera incontournable. Avec le ralentissement économique et du fait des tentations de réinstaurer le contrôle administratif sur les licenciements, des plans sociaux pourraient, d’ici la fin du mois de juin, être annoncés. Le secteur de l’automobile avec la fermeture éventuelle des usines de Douai et d’Aulnay sous Bois, le secteur de la distribution avec la FNAC ainsi que carrefour seront au cœur de l’actualité.

La tentation sera, alors, grande d’user de formules assez convenus pour tenter de freiner la dégradation de la situation de l’emploi. Or, il faudra à un moment ou à un autre admettre que le problème de l’emploi, en France, ne pourra se résoudre que par une amélioration du taux de marge des entreprises, par une augmentation des bénéfices, de l’investissement et de l’innovation. Il sera nécessaire de poser la question du niveau de gamme de la production française.

En effet, la question du déficit commercial devra être traitée faute de quoi car elle sous-tend celle de la dette publique. Avec 70 milliards d’euros de déficit commercial en 2011, la France doit emprunter à l’étranger pour équilibrer sa balance des paiements ou vendre une partie de ses actifs.

Après le 6 mai, la question de l’assainissement des finances publiques s’imposera à nouveau. Certes, une légère amélioration de la conjoncture est attendue pour le second semestre allégeant ainsi la contrainte financière, mais d’ici moins de deux ans, il faut réduire le déficit public de plus de 1,5 point. Il apparaît indispensable de réorienter les dépenses publiques vers l’investissement ce qui n’a été que faiblement dit durant la campagne électorale. Toute dérive, tout doute pourraient être sanctionnés avec comme conséquences une augmentation des taux d’intérêt qui mettrait en difficulté l’Etat, les entreprises, les ménages et le secteur financier.

Le financement de l’économie sera également un point à traiter après le 6 mai. L’accès plus difficile au crédit pour les entreprises ainsi que pour les ménages constitue un risque d’asphyxie pour l’ensemble de l’économie. D’un côté, il y a la tentation d’administrer le crédit avec des résultats, en règle générale, décevants ; de l’autre il y a la possibilité de faciliter l’accès des entreprises et des PME aux financements obligataires et par actions. Il y a aussi la question de l’épargne. Faut-il, afin de relancer l’économie ;  tenter de la diminuer avec le risque que le résultat inverse soit obtenu ? Faut-il mobiliser l’épargne pour le financement de l’économie avec une intermédiation étatique au risque d’être inefficace ? Jouer sur de l’épargne courte avec les Livrets défiscalisés constitue une tentation récurrente mais est-il logique de financer des investissements à long terme avec des ressources courtes ? Est-il logique de faire supporter aux contribuables des risques économiques ? Ne serait-il pas plus judicieux de favoriser l’épargne longue et de mieux l’orienter vers l’économie ce qui signifie au préalable que l’Etat commence par être moins dépensier. Autre défi à relever, la simplification de la vie économique… La France souffre, comme l’avait signalé la Commission Attali, d’un manque de concurrence qui entrave la croissance et l’emploi. Diminuer le nombre de professions réglementés constitue une nécessité tout comme accroitre la transparence sur certains marchés.

Le premier enjeu de l’après 6 mai sera le choix du Ministre de l’Economie qui pourrait rebaptiser en cas de victoire de François Hollande, Ministère de la croissance. Quels sont les profils envisageables ? A l’UMP, Jean-François Copé ou Alain Juppé seraient des gages d’expérience. Le choix de Nathalie Kosciusko-Morizet serait plus inattendu tout comme le retour de Jean-Louis Borloo.

Au PS, Michel Sapin aurait l’avantage de rassurer les marchés et les partenaires européens. Martine Aubry allierait l’ancrage européen, un positionnement initial à gauche et l’expérience. Ses réseaux au sein des syndicats et du patronat pourraient être un atout. Pierre Moscovici ou Manuel Valls pourraient également occuper le poste tout comme Laurent Fabius qui a, certes, l’inconvénient d’avoir eu des positions économiques à géométrie variable. La nomination de François Bayrou, surtout avant les législatives, apparaît peu probable car elle serait ressenti pour l’aile gauche comme un camouflet avec en outre le problème de l’adoption de la règle d’or.

Pour les deux camps, il y aurait l’option de nommer un technicien reconnu même si dans le passé cela n’a été guère source de bons résultats. Dans cette catégorie, pourraient être ainsi nominés, Jean-Claude Trichet, Michel Pébereau, Pascal Lamy ou Matthieu Pigasse… Réponse, d’ici quelques jours.

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