mercredi 28 avril 2010

Le modèle européen à l'épreuve

L’Europe a été la zone économique la plus touchée par la crise économique ; elle ne bénéficie qu’avec modération de la reprise qui se dessine à la différence des Etats-Unis et de l’Asie.

Par facilité et par souci de faire porter la faute d’autres, il a été complaisamment répété que la crise était d’origine américaine et qu’elle n’était que le fruit de comportements spéculatifs et pervers de banquiers anglo-saxons.


Force est d’admettre que la crise avant d’être financière est économique. Cette dernière avait commencé avant même les révélations sur les défaillances de certaines banques ou de certains fonds. La multiplication des déséquilibres, l’affaissement des gains de productivité en occident ainsi que la hausse des matières premières ont tissé une trame de fond propice au déclenchement d’une crise majeure dont les premiers signes remontent à 2007.

Les responsables européens en reportant les torts sur les Etats-Unis ont négligé d’étudier la réalité économique.

L’Europe est gangrénée par une dérive des comptes publics d’un grand nombre de ses Etats, par de faibles gains de productivité et par une atonie de la croissance entretenue également par une stagnation de sa population.

En 2008/2009, les dirigeants européens ont répété que la crise marquait la victoire du modèle européen reposant sur un système développé d’Etat providence. Ce système n’a pas empêché la crise, le chômage, la pauvreté… Ce système est aujourd’hui une chape de plomb qui empêche l’Europe de renouer avec la croissance.

A la différence des Etats-Unis, les marges de manœuvre d’un grand nombre d’Etat européens sont faibles. Les déficits publics étaient élevés avant la crise. La norme des 3 % du PIB fixé par Maastricht était, sans nul doute, trop laxiste en période de croissance ; elle a été, en outre, contournée par de nombreux Etats. L’endettement n’a pas cessé de croître depuis le milieu des années 70, seuls quelques Etats ont réussi à le réduire ou à la stabiliser mais à des niveaux élevés. Face à la crise, les Etats ont tout à la fois accru la dette publique en acquérant des participations dans des entreprises et en multipliant les dépenses de soutien. Le patient européen était déjà drogué ; il a été décidé d’accroître la dose de morphine au risque de le plonger en léthargie.

A l’heure de régler les comptes, car le transfert massif de dettes du privé vers le public ne pouvait pas laisser les investisseurs indifférents, les Européens sont démunis. Le niveau élevé des prélèvements obligatoires (plus de 40 % du PIB en moyenne) rend l’utilisation de cette arme difficile. L’augmentation des impôts et taxes ampute le pouvoir d’achat des consommateurs ou pénalise la compétitivité déjà faible des entreprises. Les Etats-Unis avec un taux de prélèvements obligatoires de 30 % du PIB n’ont pas le même problème.
Il ne reste donc comme possibilité que de réduire les dépenses comme il est demandé de le faire à la Grèce avec comme conséquence de plonger l’Europe encore plus dans la stagnation.

Ce qui est en cause c’est bien le modèle européen d’économie mixte avec un système large de protection sociale qui coûte plus qu’il ne protège.

Avec une population vieillissante accrochée à ses droits et avec une jeunesse peu nombreuse et sans illusion, l’Europe est en proie aux doutes.

Le succès allemand semblerait prouver que des solutions existent. L’Allemagne a réussi à surmonter le coût de la réunification et de maintenir sa compétitivité afin de rester le leader des exportations mondiales au prix d’une maîtrise poussé des salaires et d’une gestion stricte des finances publiques. Le régime des retraites a été réformé en fixant un taux maximum de cotisation et en prévoyant de relever l’âge légal à 67 ans. Il n’est pas surprenant que l’Allemagne ait réussi à maintenir son déficit public autour des 3 % du PIB en pleine crise. L’Allemagne est aidée par sa démographie. Depuis 2003, l’Allemagne se dépeuple ; elle peut supporter plus facilement une réduction de son système d’Etat providence. Les gains de PIB sont plus faciles à partager avec une population en diminution qu’avec une population en croissance.

Il n’est pas étonnant que les Allemands rejettent l’idée d’aider les pays laxistes ayant laissé filer leurs déficits depuis des années. En vertu de quoi les fourmis devraient aider les cigales. Déjà méfiants lors de l’instauration de l’euro et de l’abandon du mark, ils sont aujourd’hui hostiles à se transformer en pompiers européens.

Dans une zone euro où il n’y a pas de gouvernement économique, où la mobilité des travailleurs est faible, où il n’y a pas de fonds de soutien, tout écart de compétitivité, tout écart en matière de gestion publique se paie directement et cher. La zone monétaire européenne n’a jamais été optimale au sens des monétaristes. Il y a urgence de trouver des solutions pour instaurer des soupapes de sécurité. Il y a eu défaillance des organes de contrôle qui n’ont pas anticipé les risques que les Etats membres faisaient prendre aux autres à travers des politiques laxistes. Les Etats souverains n’acceptent pas l’immixtion dans leurs affaires publiques ; le problème est que depuis 1999, l’euro est le bien commun de 16 Etats qui en sont collectivement responsables. La mise sous tutelle d’Etats membres n’est pas prévue d’où le recours au FMI comme gardien du temple. Jusqu’à maintenant ses interventions étaient liées à des problèmes de changes, de déficits de balance des paiements courants, avec l’euro, il doit intervenir pour régler des problèmes de déficits et de dettes excessifs. Certes, cette problématique existe dans ses autres interventions. Le Royaume-Uni et plus récemment l’Islande ont fait appel au FMI pour surmonter des crises financières. Il n’en demeure pas moins que l’Europe semble démunie pour juguler un mal qui ronge depuis plus de 30 ans un grand nombre de ses membres.

Le retour à un modèle moins laxiste, moins démagogique, plus ciblé, moins étatiste constitue une nécessité pour faire face à la crise de l’endettement public mais aussi pour reprendre le chemin de la croissance mondiale.

Espérance de vie/CSP/Diplômes

L'écart d'espérance de vie entre ceux qui ont un diplôme BAC + 4 et plus et ceux qui ont une durée d'études supérieures de moins de 3 ans est de 3,5 ans en ce qui concerne les hommes. Pour les femmes, l'écart est moindre.

L'espérance de vie à 55 ans d'un homme sans diplôme est de 35,6 ans contre 31,5 ans pour les femmes. Pour un homme ayant le niveau du BAC, l'espérance de vie est de 27,7 as pour un homme et de 32,7 ans pour une femme.

Pour un diplômé du 2ème ou du 3ème cycle, l'espérance de vie pour un homme est de 30 ans et pour une femme de 32,8 ans.

En matière de CSP, l'espérance de vie à 55 ans est de 25,5 ans pour les ouvriers (31,7 pour les femmes) de 26 a ns pour les employés (32,6 ans pour les femmes)et de 27 ans pour les professions intermédiaires (34 ans pour les femmes). Les cadres ont une espérance de vie de 29,2 ans pour les hommes de 29,2 ans et de 33,6 ans pour les femmes soit un écart entre sexe de 4,2 ans.

L'écart d'espérance de vie entre un ouvrier et un cadre homme est de 3,8 ans et de 1,9 pour une femme.

Ces écarts semblent donner raison aux tenants de la prise en compte de la pénibilité mais il faut également intégrer le fait que les cadres prennent plus tardivement leur retraite que les ouvriers et les employés réduisant ainsi la durée effective de leur retraite.

vendredi 23 avril 2010

La lettre Agir Pour Ma Retraite - Avril 2010


Le troisième numéro d'Agir Pour Ma Retraite est publié.

Au sommaire :

- le rapport du Conseil d'Orientation des Retraites
- l'article 39
- Voies et Moyens de la Réforme
- Surcote et décote
....

lire la lettre n°3

mercredi 21 avril 2010

Effet domino ou endiguement

En 2010, il ne s'agit pas de lutter contre la tentation hégémonique de l'URSS mais d'éviter la contagion de la crise grecque à d'autres pays de la zone euro.

La Grèce qui représente environ 2 % du PIB de l'Union européenne et compte 11 millions d'habitants menace avec sa dette publique de 300 milliards d'euros la stabilité de la principale puissance économique et commercial mondial dont le PIB dépasse 18 000 milliards de dollars.

Or, aujourd'hui, il y a une nécessité d'endiguer la Grèce pour éviter un effet domino. L'Europe et surtout la zone euro traversent sa première grande crise.

Que la Grèce puisse avoir un déficit public excessif ne devrait surprendre personne car ce Etat, depuis son indépendance, n'a que très rarement enregistré des excédents budgétaires.

Que ce déficit soit supérieur à 10 % voire 12 % du PIB en 2009 quand il était annoncé à 8 % n'est pas non plus une surprise car les statistiques ont toujours été élastiques dans ce pays.

Il n'en demeure pas moins que la zone euro est sous tension du fait que la Grèce pour faire face à ses engagements doit emprunter à hauteur de 8 % soit plus de 5 points au-dessus du taux pratiqué pour les emprunts allemands à 10 ans. Or, avec une inflation de 2 ou 3 points, le taux réel pratiqué est de plus de 5 points, soit une prime de risque importante et difficilement supportable à moyen terme.

L'Allemagne a renâclé à venir en aide aux Grecques afin d'éviter le précédent. La population allemande qui a du supporter des efforts importants tant pour réaliser l'unification et pour améliorer la compétitivité de l'économie (baisse de salaire, augmentation de la TVA) ne veut pas payer pour les Grecques considérés comme peu vertueux. Les Allemands ne veulent pas devenir les pompiers des Etats laxistes.

Les Etats membres de l'Union ont décidé d'accorder une enveloppe de prêts pouvant aller jusqu'à 30 milliards d'euros au taux de 5 % en contrepartie de quoi la Grèce était invitée avec le concours du FMI de restaurer ses finances.

La Grèce se caractérise par le poids de son secteur public, environ 40 % du PIB et par le rôle du travail au noir.

Les services qui représentent plus de 70 % de la valeur ajoutée sont dominés en ce qui concerne le secteur privé par le tourisme.

Il y a de ce fait peu de relais de croissance d'autant plus que la population stagne du fait d'un des plus faibles taux de fécondité de l'Union , 1,29 ce qui rapproche ce pays de l'Allemagne.

La mise en œuvre du plan de rigueur devrait se traduire par une contraction du PIB de plus de 2 points cette année et de plus d'un point en 2011.

Après la Grèce, la zone euro compte-t-elle d'autres maillons faibles ?

Certains pensent à l'Espagne et au Portugal. L'Espagne souffre d'une hypertrophie du secteur du bâtiment et de la spéculation immobilière de ces dernières années. En revanche, sa dette et sa duration sont mieux maîtrisées qu'en Grèce. Le Portugal, du fait de sa taille réduite, constitue une menace relative tout comme l'Irlande.

Les Etats européens disposent d'une arme que les Etats d'Amérique latine n'avaient pas dans les années 80 et 80 pour assainir leurs finances, les impôts. La base taxable de l'Irlande, de l'Italie, de la France ou de l'Espagne est beaucoup plus large que celle qui prévalait en Argentine ou au Brésil à l'époque.

Néanmoins, les Etats de l'Union pensaient avoir deux ou trois ans de répit pour passer de la pire crise depuis 1929 à l'indispensable assainissement de leurs finances publiques. Ce délai de grâce a été supprimé avec comme conséquence une croissance en berne.

La zone euro risque d'être le parent pauvre de la reprise économique faute d'avoir pu mettre en place des politiques structurelles à l'échelle européenne.

L'Union opte pour un régime de basse pression économique avec comme danger une déstructuration progressive de son système de protection sociale.

A force de ne pas s'adapter, les pays européens préfèrent que les marchés et la Commission de Bruxelles décident à leur place.

L'effet domino ne devrait pas intervenir tout comme la sortie d'un Etat de la zone euro. Le prix à payer serait supérieur aux gains. Si la Grèce sortait, elle pourrait certes déprécier sa monnaie mais elle serait poussée à la banqueroute. Elle devrait rembourser en euros et les taux pour s'endetter dépasserait de loin les 8 % actuels. Si jouer sur la valeur de la monnaie est impossible et si la mobilité du travail est faible ce qui est le cas au sein de la zone euro, il faut instituer des mécanismes de correction. Il y a un devoir européen de doper la croissance grecque car à 5 ou à 8 % cet Etat ne pourra pas rembourser sauf à provoquer une révolution de la part d'un peuple au sang chaud qui ne supportera pas longtemps la rigueur.

jeudi 15 avril 2010

Le rapport du Conseil d'Orientation des Retraites

Par rapport aux prévisions de 2007, le besoin de financement a été multiplié par deux du fait de la crise qui diminué les ressources et qui risque de peser durant de nombreuses années sur la croissance potentielle. Ce besoin, en fonction des scenarii, varie entre 1,7 à 3 points de PIB, soit de 72 à 115 milliards d’euros. La dégradation serait très rapide ; à l’horizon 2015 le besoin de financement pour les trois scénarios atteindrait déjà 1,8 point soit 40 milliards d’euros quelque soit le scénario.

Le Conseil d’Orientation des Retraites souligne que le déficit d’investissement que l’économie française a connu en 2008 et 2009 aura des effets durables sur le potentiel de croissance.

Dans le scenario A, le montant des déficits cumulés atteindrait 77 points de PIB en 2050 contre 61 points dans le rapport de 2007.

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mardi 13 avril 2010

Rapport du Cor : chronique de déficits attendus

Le rapport du Conseil d'orientation des retraites (COR),
souligne que le besoin de financement de tous les régimes (de base et complémentaires, pour les salariés du public et du privé ou les travailleurs indépendants) atteindrait entre 72 et 115 milliards d'euros par an en 2050.

En retenant le scénario A (gain de productivité de 1,8% par an et chômage à 4,5% par an à partir de 2020), considéré très optimiste par tous les experts, le déficit serait de 40,7 milliards en 2020 et de 72 milliards en 2050 (1,7 point de PIB), dont 51,8 milliards pour la Cnav (régime de base des salariés du privé).

En optant pour le scénario B (1,5% de gain de productivité annuel et 4,5% de chômage après 2020), le besoin de financement global s(élèverait à 45 milliards en 2020 et 103 milliards en 2050 (2,6 points de PIB), dont 64,4 milliards pour la Cnav.

Enfin, le scénario C (1,5% de hausse annuelle de la productivité et 7% de chômage à partir de 2020), le besoin de financement est de 48,8 milliards par an à l'horizon 2020 et de 115 milliards à l'horizon 2050 (3 points de PIB) dont 65 milliards pour la Cnav.

Philippe Crevel en débat avec Henri Sterdyniak sur Public Sénat : lundi 12 avril 2à10

Public Sénat avait convié lundi 12 avril 2010 au Journal de 18 heures Philippe Crevel à débattre sur la réforme des retraites avec Henri Sterdyniak, économiste à l'OFCE.

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vendredi 9 avril 2010

La malédiction du pouvoir en France

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De septennat en quinquennat, la vie politique française depuis plus de trente ans est rythmée par des cycles en vertu desquels l’exécutif en vient toujours à abandonner ses promesses et ses idéaux afin de tenter de récupérer une opinion et des médias qui le rejettent.

Le pouvoir est dans notre pays, en soi, illégitime. L’opinion, la rue l’emportent toujours à un moment on un autre. Puis, au niveau des symboles, il convient de souligner que les lieux d’exercice du pouvoir, l’Elysée, Matignon, la Palais Bourbon n’ont pas été construits initialement pour la Présidence de la république, les services du Premier Ministre ou la Chambre des députés. Les révolutions ont eu raison des anciens lieux de pouvoirs transformés en musées ou détruits comme pour les Tuileries. La France n’en a toujours pas terminé avec le raccourcissement de Louis XVI, la fin du Second Empire ou l’humiliation de 1940 ainsi qu’avec les guerres coloniales.

Les élections confèrent à l’exécutif un sursis qui peut durer de quelques mois à deux ans mais rarement plus. C’est le mythe des cent jours, de la lune de miel… Durant cette période, il est pour utiliser une expression de franglais « médiamaker ». Il est générateur d’actualités. Il est créateur d’évènements positifs. C’est tout neuf et tout beau. Les journalistes relaient alors avec complaisance les faits et gestes des nouveaux puissants. Drogués par cette illusion de puissance, les responsables en viennent à commettre toute forme d’excès et à perdre le sens de la mesure. Notre tradition royaliste prend le dessus amenant la presse et l’opinion à se retourner. Et puis, il est toujours amusant de condamner ce que l’on a tellement aimé. Le pouvoir de « médiamaker » devient « mediataker ». Il est obligé de réagir, de se justifier par rapport aux allégations de la presse, des blogs… Il court derrière l’actualité. De pyromane, il est transformé en pompier impuissant. A peine, un incendie est éteint que plusieurs autres prennent aux quatre coins de la France. L’opposition et les syndicats n’ont qu’à jeter que quelques gouttes d’huile à jeter pour embraser de multiples foyers qui durant la première période n’auraient donné lieu qu’à quelques lignes au fonds d’une rubrique. Un responsable de FO avait un soir dans le bureau d’un ministre de la santé déclaré que la démocratie sociale, c'est-à-dire la force de la rue mue par des organisations qui ne représentent que quelques pour cents de la population active l’emporte toujours sur la démocratie politique. Ce coup de menton n’est pas sans fondement.

Face aux déchainements médiatiques, face à la baisse dans les sondages, les gouvernements en viennent à abandonner leur programme. En règle générale, ils essaient de colmater les brèches en décidant la pause dans les réformes et en obéissant aux diktats de la presse. Ils en arrivent à pratiquer une politique inverse à leurs engagements.

En 1981, François Mitterrand est élu sur la base d’un changement net d’orientation de la politique économique. Dès 1982 avec la défaite aux cantonales et surtout en 1983, après les résultats catastrophiques des municipales et la dégradation de la situation économique, l’exécutif décide la pause dans les réformes. La bataille de l’école privée, en 1984 aura raison de l’esprit du 10 mai 1981. La nomination de Laurent Fabius comme Premier Ministre et le départ des ministres communistes confirment la modification du cap ce qui n’empêchera pas la droite de gagner les élections législatives de 1986.

La première cohabitation de 1986-1988 n’échappera pas à la règle même si elle demeure comme une période durant laquelle un gouvernement oser mettre en œuvre une grande partie. Les manifestations étudiantes et la mort de Malik Oussekine ont néanmoins provoqué une césure ; il y a avant et après cette mort. Avant Jacques Chirac est dans la certitude de gagner l’élection présidentielle ; après il tente de ne pas mourir. Sa défaite a marqué l’histoire politique de ses vingt dernières années. Pour gagner l’élection suivante, le pouvoir se doit de na pas appliquer son programme et gérer au fil de l’eau. Telle a été la leçon qui a, à tort, été retenue de cette première cohabitation.

La période 1988-1993 est marquée par la lente déliquescence sur fonds d’affaires du pouvoir socialiste. Il n’en demeure pas moins qu’elle comprend deux partie, la première avec Michel Rocard, Premier Ministre populaire qui instaure la CSG et tente de réformer le pays en conservant les acquis libéraux du précédent gouvernement, la seconde avec les gouvernements d’Edith Cresson et de Pierre Bérégovoy impopulaires qui sont ballotés par les évènements.

La seconde cohabitation se veut différente de la première du fait que François Mitterrand ne se représente pas et qu’Edouard Balladur entend ne pas commettre les erreurs de son ancien mentor et désormais concurrent. Il veillera à appliquer avec un extrême pragmatisme le programme de 1993 ce qui n’empêchera de buter sur le Contrat d’Insertion professionnelle. Dès la fin de l’année de 1993 et surtout à partir du mois de mars 1994, la période de grâce est terminée. La descente aux enfers sera lente mais tracée jusqu’à la défaite en 1995.

L’élection de Jacques Chirac donnera lieu à la plus courte lune de miel. Dès la fin de l’année, le pouvoir doit abandonner son ardeur réformatrice et se contenter de gérer le quotidien. Les grandes manifestations de l’hiver 95 cumulées avec les affaires ainsi que les divisions au sein de la majorité incitent le pouvoir à anticiper les élections législatives en 1997, une année avant la fin de la législature. Le pari fut perdu du moins pour la conservation de Matignon mais se révéla judicieuse pour la réélection de Jacques Chirac.

Le quinquennat « matignoneste » de Lionel Jospin et de la gauche plurielle commença dans le bonheur avec le retour de la croissance et les 35 heures. Tout réussissait au nouveau Premier Ministre. Son équipe était appelée la « dream team » avec Dominique Strauss-Kahn, Elisabeth Guigou, Martine Aubry, Dominique Voynet… L’assassinat du Préfet Erignac, la difficile application des 35 heures rendues obligatoires dans le dos du patronat, les divisions à gauche fissurèrent l’édifice. Le balancier mis à gauche toute au début de la législature se déplaça à droite avec un Laurent Fabius devenu Ministre de l’Economie et qui se voulait être le Tony Blair français. L’impôt sur le revenu fut abaissé et les stocks options favorisées. Lionel Jospin ne franchit pas le premier tour offrant à Jacques Chirac, tout étonné, une élection à la soviétique.

Avec 82 % des voix, la légitimité aurait pu être forte et durable or elle ne résista pas à l’épreuve de la tradition. Jean-Pierre Raffarin, au début, avec son côté bon sens près de chez-vous » fut très populaire et entrepris de réformer le système de retraite. La canicule de 2003 et l’usure des bonnes formules génèrent un désamour au point où la droite perdit les élections régionales et cantonales de 2004 ainsi que l’élection européenne de 2005. Impopulaire, l’exécutif dut subir une défaite humiliante avec le référendum concernant le Traité constitutionnel européen voulu par la France et écrit sous l’autorité de Valéry Giscard d’Estaing. Dominique de Villepin a en quelques mois connu la même fatalité, l’envol dans les sondages, le côté tout est possible puis la douche froide avec l’échec du CIE et l’affaire clairstream.

2007 rererebelotte… Nicolas Sarkozy avait prouvé qu’il pouvait être mediamaker sur longue période en tant que ministre de l’intérieur. Il le fut durant toute la campagne électorale. Par son dynamisme, il continua au-delà des quelques incompréhensions provoquées par le yacht de Bolloré ou son escapade estivale aux Etats-Unis durant l’année 2007 à créer le mouvement et à maintenir le cap. La crise en lui conférant un rôle international renforça sa stature. La victoire relative de l’UMP à l’élection européenne de 2009 lui donna un sursis tout comme la popularité de son Premier Ministre. Il n’en demeure pas moins qu’au fil des mois, la presse a repris son droit à détruire, à créer l’actualité. D’offensif, le pouvoir est devenu défensif. Les Ministres courent de plus en plus derrière les incendies allumées pour certains par eux-mêmes, par leurs collègues. Toutes les décisions sont mauvaises. Il en fut ainsi avec le plan de vaccination comme il en est aujourd’hui avec les expropriations en Vendée et en Charente Maritime après les inondations liées à la tempête Xynthia. Il y a quelques semaines, toute la presse considérait qu’il fallait détruire les maisons ; aujourd’hui, c’est scandaleux de priver de leur maison des familles…

Englué dans l’histoire du bouclier fiscal, terrible mot pour un principe qui devrait faire l’objet d’un consensus (est-il normal que plus de la moitié de ses revenus soit affectée aux impôts), le pouvoir en vient à vouloir taxer les riches ce qui signifie en France taxer les cadres moyens et les cadres supérieurs, c'est-à-dire ceux qui sont déjà les plus imposés. A vouloir obéir à l’opinion publique, le pouvoir risque de se désagréger.

La remise en cause du bouclier fiscal pourrait intervenir dans le cadre de la réforme des retraites. Il est fort à parier qu’à deux ans de l’élection présidentielle, de peur de se mettre à dos la démocratie sociale, le pouvoir décide de modifier avec prudence les paramètres avec comme conséquences de mécontenter tout le monde. Augmentation des contributions, allongement de la durée de cotisation, étude pour l’avenir de la retraite par points et du report de l’âge légal de départ à la retraite… Rel pourrait être le programme de la négociation.

jeudi 8 avril 2010

La lettre d'information du Cercle - Avril 2010

Au sommaire de la lettre n°45 du Cercle

- de l'assurance-vie à l'assurance-retraite
- l'emploi des seniors, une question d'âge social
- le taux d'équipement des entreprises en produit d'épargne retraite
- les contrats Madelin
- la dépendance
- l'avenir du PERP
...


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mercredi 7 avril 2010

Quand le mauvais impôt risque de chasser le bon

Jean-François Copé et le Parti socialiste ont au moins un point en commun, celui de vouloir fusionner la CSG et l’impôt sur le revenu. Cette tentation existe depuis la création, en 1990, de cette contribution par Michel Rocard. La CSG avait été adoptée par le seul PS avec le renfort de quelques centristes contre le reste de la droite et du parti communiste.

La C.S.G. a été, en effet, créée par la loi de finances pour 1991 du 29 décembre; elle recouvre trois contributions distinctes :

- une contribution sur les revenus d’activité et de remplacement,
- une contribution sur les revenus du patrimoine,
- une contribution sur les produits de placement à revenu fixe soumis à prélèvement libératoire

L’assiette de la CSG se décompose de la manière suivante :

- 71 % revenus d’activité ;
- 18 % retraites et allocations chômage ;
- 10 % revenus du capital ;
- 1 % gains des jeux.

Fixé initialement à 1,1 % en 1991, le taux de la CSG a été relevé à 2,4 % le 1er juillet 1993. A compter du 1er janvier 1997, l’assiette de la CSG a été élargie et le taux porté à 3,4 % du fait du transfert de 1,3 points de cotisation d’assurance maladie. Ce nouveau point supplémentaire est déductible du revenu pour le calcul de l’IR.

Lors de son instauration, le Gouvernement de Michel Rocard avait opté pour la non-déductibilité de la C.S.G. de la base de l’impôt sur le revenu ; la CSG pouvait donc être assimilée à un prélèvement fiscal.


La CSG sert à financer la C.N.A.F. pour 1.1 point et le Fonds de solidarité vieillesse pour 1.3 points et la CNAM avec depuis le depuis le 1er janvier 1998, le transfert de 4,75 points de cotisation d’assurance maladie sur 4,1 point de CSG.

De ce fait, depuis cette date, le taux de la CSG est 7,5 points.

Des taux spécifiques ont été institués pour les demandeurs d’emploi et les retraités.

Le taux de CSG est donc porter à 6,2 points pour les retraités.

Actuellement, sont exonérés de la CSG, les bénéficiaires de pension attribuée sous condition de ressources ou dont la cotisation d’impôt sur le revenu est inférieure au seuil de recouvrement avant réduction d’impôt.

Les initiateurs de la CSG avaient comme objectif d’instituer un prélèvement simple englobant la totalité des revenus et à fort rendement. A la différence des cotisations sociales qui ne concernent que les revenus du travail, la CSG touche les autres types de revenus (fonciers, financiers…). Par ailleurs, l’instauration d’un taux proportionnel garantissait un bon rendement. A la différence de l’impôt sur le revenu qui ne concerne qu’un contribuable sur deux, la CSG est acquittée par presque la totalité de tous les Français. Par ailleurs, jusqu’à aujourd’hui, elle a échappé aux tentations pourtant nombreuses de lui adjoindre des gadgets fiscaux visant à élimer son caractère proportionnel. Le risque est de le transformer en impôt sur le revenu bis et que le mauvais impôt chasse le bon.

L’impôt sur le revenu ne rapporte que 50 milliards d’euros quand le montant de la CSG s’élève à plus de 84 milliards d’euros.

Fusionner les deux impôts aboutirait à parer le nouvel ensemble de tous les défauts de l’impôt sur le revenu. Naturellement seraient pris en compte les charges familiales, puis le montant des revenus, puis à force les niches fiscales qui, pourtant contestées ne manqueraient pas d’envahir ce nouveau terrain de jeu.

En France, l’impôt proportionnel est honni. Il a deux avantages : l’efficacité et la neutralité. La progressivité est assurée par l’impôt sur le revenu. Dénaturer la CSG aboutirait à engendrer une usine à gaz.

Certains considèrent qu’il faut taxer davantage les riches et alléger la facture fiscale des personnes à revenus moyens or par définition le nombre de personnes aisées est faible voire très faible. La masse imposable se situe non pas en haut de la pyramide mais en son cœur ; fusionner les deux impôts aboutira à frapper les classes moyennes qui n’ont pas la faculté de monter des systèmes fiscaux pour diminuer leur pression fiscale ou qui n’ont pas la possibilité de s’expatrier.

L’idée de la fusion de la CSG et de l’IR est démagogique. La mise en place d’un impôt sur le revenu prélevé à la source sans année de décalage comme de nombreux candidats à l’élection présidentielle l’avaient promis, constituerait une avancée donnant en outre la faculté de supprimer de nombreuses niches fiscales.