jeudi 11 janvier 2007

Les sanglots longs des violons de l'économie française

Au troisième trimestre 2006, la croissance française a été étale. Est-ce une véritable surprise ? Est-ce un trou d’air ou une simple pause après un très bon second trimestre ? Au-delà des explications conjoncturelles, les vacances, l’imputation du lundi de Pentecôte, le déstockage…, la France est en peine avec sa croissance depuis des années. En 2005, la croissance n’a été que de 1,2 %. Sur ces dix dernières années, elle n’a été, en moyenne annuelle, que de 1,5%. Cette panne intervient alors que le monde connaît un choc d’expansion sans précédent, + 4,5 % en 2005. Ce choc se nourrit de la croissance de la Chine, + 10 %, de l’Inde, + 9 %, de la Russie, + 6 %, mais aussi des pays d’Amérique latine. Des pays anciennement industrialisés comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni participent pleinement à cette expansion. Même l’Allemagne qui longtemps partageait les records de langueur de la France a renoué avec le succès en 2006.

Comment expliquer que la France se languit au moment où ses grandes entreprises accumulent les bénéfices ? Elles réalisent une part de plus en plus importante de leur chiffre d’affaire à l’étranger, sur des marchés en forte croissance. Faut-il le regretter ? Certainement pas ; leurs bénéfices financent l’Etat et sont, en partie, redistribués aux actionnaires français, certes leur nombre est trop faible ; les entreprises françaises du CAC 40 étant détenues à plus de 47 % par des fonds étrangers.

Le mal français ressemble à celui du milieu des années quatre-vingt, en pire car les marges de manœuvre ont disparu et que la volonté de changement s’est émoussée. La compétitivité de notre économie est faible, la meilleure preuve étant fournie par l’ampleur du déficit commercial. La facture énergétique n’explique pas tout, loin de là ; l’Allemagne, n’ayant pas plus de pétrole que nous, accumule des excédents. C’est le positionnement de notre économie qui est mauvais. Cette dernière dépend, dans sa composante industrielle, essentiellement de l’automobile et de l’aéronautique. Il suffit que l’un des deux ou les deux secteurs s’enrhument pour que les résultats macroéconomiques s’en ressentent comme c’est le cas actuellement.

Il est à craindre que le problème du secteur automobile français ne soit pas que d’ordre conjoncturel. PSA ou Renault sont des créateurs de voitures mais surtout des assembleurs de pièces détachées. Cette dernière fonction peut être réalisée un peu partout et à moindre prix qu’en France. De ce fait, ce secteur est voué à connaître un processus de délocalisation d’autant plus que les marchés d’aujourd’hui et de demain se trouvent en Asie et en Amérique Latine. Les fermetures d’usines en Belgique ou au Royaume-Uni de la part de Renault, de PSA ou de Volkswagen en annoncent malheureusement d’autres. La faiblesse de l’industrie automobile française est également liée à un manque d’investissements sur les créneaux porteurs : voiture hybride, 4x4, petites voitures avec du caractère style Mini de BMW.

L’autre grand vecteur d’excédents et d’images de l’économie française, Airbus, souffre d’autres maux. Il s’agit d’une crise de croissance qui se double de problèmes liés au passage d’une coopération politique à une affaire commerciale. Avec l’A320, Airbus est devenu une véritable success-story. Cette compagnie née de la coopération d’avionneurs et de motoristes européens n’ayant pas la taille critique pour conquérir le monde a réussi à doubler Boeing en moins de quarante ans. Enivré par ses succès, Airbus et les politiques l’entourant, ont lancé le programme de l’A380 afin de concurrencer le Boeing 747. Il s’agissait d’un acte de puissance car le créneau des jumbos n’est pas le plus rentable. De plus, afin de contenter tous les partenaires, le plan d’assemblage de l’A380 génèrent des surcoûts et des retards qui peuvent être, sans nul doute, surmonter. En revanche, les hésitations sur l’A350, long courrier mono-couloir sont plus dangereuses compte tenu de l’avance prise par Boeing sur ce marché beaucoup plus important et rémunérateur que le précédent. Au-delà de ces choix économiques, Airbus tout comme Boeing délocaliseront une part non négligeable de leur production dans les pays asiatiques qui seront les principaux débouchés des vingt prochaines années. La décision d’EADS de construire une chaîne de montage d’A320 en Chine le prouve.

Sauf revirement de tendance et remise en cause du processus de mondialisation, pour des raisons de coûts, les pays occidentaux doivent se positionner sur les créneaux sur lesquels la concurrence est la plus faible ou plutôt là où ils ont les avantages comparatifs les plus élevés. La bataille se porte désormais sur la recherche, la conception, le marketing et la vente. La production de biens industriels et aussi de services a vocation à être délocalisée. Robert Reich, ancien conseiller du travail de Bill Clinton, a dans un de ses livres « l’économie mondialisée » dépeint, il y a déjà plus de quinze ans, cette évolution qui est loin d’être négative. Ce qui coûte et donc rapporte le plus, c’est créer et vendre.

La France est absente sur les marchés de l’informatique et perd du terrain dans les secteurs de la recherche pharmaceutique, des biotechnologies ou des nanotechnologies. Il reste encore des pôles d’excellence comme dans le nucléaire ou dans le luxe mais cela ne suffit pas à développer une économie dynamique.

Pour le moment, la France, comme souvent lors d’une révolution économique, hésite sur le chemin à prendre : le repli ou les règles du marché, vivre en dehors de l’histoire ou l’épouser. Il est souvent mis en avant pour expliquer nos déboires, les 35 heures, le coût du travail, le poids des prélèvements… Il est certain que la France a accumulé les handicaps mais aucun n’est rédhibitoire. Il y a actuellement une telle différence de coûts entre les pays d’Asie et les pays occidentaux que cela lisse au sein de ces derniers les écarts. L’Allemagne dont les coûts sont très proches des nôtres enregistrent excédents sur excédents en matière de balance commerciale. Ce n’est pas une exonération sur 1,3 fois ou 1,6 fois le SMIC qui change la donne. La bataille est ailleurs même. Il faut être « price-maker » sur des créneaux porteurs. L’Allemagne est « price-maker » sur les voitures haut de gamme, sur les secteurs de l’équipement industriels. Les pays scandinaves démontrent que l’on peut associer coûts élevés, système de protection sociale étendue et compétitivité.

Or, la France semble avoir déposé les armes en matière d’innovation et de recherche et même en matière d’investissement tout court.

La croissance est aujourd’hui alimentée par la consommation des ménages qui en progressant alimentent les importations ; le déficit commercial dépassera, cette année, le record de l’année dernière, 26 milliards d’euros.

Si le sentiment de déclin est, à juste titre, partagé, il n’en demeure pas moins que l’immobilisme l’est également. Au nom du principe de précaution, la science et le progrès ont été mis en quarantaine. Au nom du Paris éternel, tout doit être classé, même les entrepôts et la gare sans charme d’Austerlitz, les tours sont bannies tout comme les restructurations urbaines de grande ampleur. Comment dans ces conditions accueillir les sièges sociaux des grandes entreprises ? Au mieux elles choisissent comme Generali ou Mittal Arcelor, Saint Denis, au pire, elles optent pour Bruxelles ou Londres.

La production physique de produits et de services sera de moins en moins l’apanage des pays occidentaux mais des pays en décollage économique. En revanche, les fonctions de conception, commerciales, de marketing, de recherche et de services de proximité ont vocation à se développer. Le vieillissement de la population mais plus globalement la volonté d’être épaulé dans sa vie quotidienne sont des sources d’emplois. En France, réaliser une prestation pour une autre personne est considéré comme dévalorisant, dégradant. La France, premier pays pour le nombre de touristes, est connue pour la médiocrité de la qualité de son accueil, les services aux personnes âgées ou même les fonctions commerciales sont connotées négativement. L’esprit de 1789, les « 200 familles », la lutte des classes hantent notre inconscient collectif tout comme notre soif du statut, de la sécurité à tout prix et à tous les niveaux.

Quoi qu’il arrive en fin d’année, la croissance française avoisinera les 2%, soit un des meilleurs taux depuis le début du troisième millénaire, taux néanmoins insuffisant pour alimenter un cercle vertueux d’assainissement de nos finances publiques. Avec plus de 1100 milliards d’euros de dettes et un déficit budgétaire de 41 milliards d’euros, l’Etat est en situation de faillite. A plus ou moyen court terme, le relèvement des impôts est inévitable avec à la clef un risque déflationniste. L’autre solution consiste à engager des remises en cause en profondeur des structures publiques. D’autres pays comme le Canada, la Nouvelle Zélande ou le Royaume-Uni l’ont fait.
Les mauvais résultats de la conjoncture française et les incertitudes politiques n’ont pas d’incidence sur le CAC40 ; les entreprises françaises étant de moins en moins dépendantes du marché national. Le CAC 40 a progressé de plus de 15 % depuis le début de l’année (au 20 novembre 2006) et a franchi la barre des 5500 points. L’impact de l’éclatement de la bulle Internet s’estompe. Les cours des actions peuvent-ils continuer à progresser dans les prochains mois au même rythme qu’actuellement ? Les tensions internationales, en particulier au Moyen Orient et en Corée persistent ; l’augmentation des taux par la FED a pour conséquences la baisse des prix de l’immobilier aux Etats-Unis et privent les ménages américains d’un effet richesse ce qui pourrait peser sur la consommation. La croissance russe est conditionnée au maintien des prix élevés de l’or noir qui dépend de la demande asiatique et américaine mais aussi de facteurs spéculatifs. L’année prochaine, il y a un risque de ralentissement en Allemagne du fait de l’augmentation de la TVA. Pour la Chine, les jeux olympiques de 2008 devraient conduire au maintien d’un fort taux d’activité. De ce fait, la croissance devrait se ralentir doucement dans les prochains mois ce qui pour la France signifierait un tassement de la croissance de l’ordre de 0,5 point. Elle devrait toute chose étant égale, par ailleurs, tourner autour de 1,5 % l’année prochaine

mercredi 10 janvier 2007

Le roi dollar

Chute du dollar ; le Roi est mort ?


La baisse du dollar de ces dernières semaines annonce-t-elle la fin de l’hégémonie de la monnaie américaine et le début de la chute de l’Empire yankee ? Quelle sera la parité avec l’euro dans trois ou six mois ? Un euro pour 1,4 dollar, pour 1,5 dollar…. Comme bien souvent, la passion du quotidien l’emporte sur la raison. Il y a quelques semaines, les diseuses de mauvaises aventures n’affirmaient-elles pas que le pétrole battrait tous ses records avant la fin de l’année, qu’il dépasserait les 100 dollars le baril. C’est au tour du dollar d’être au cœur du brasier des scoops. Certes, en la matière, depuis des décennies, les pythies nous abreuvent de prévisions selon lesquelles le dollar ne peut que se déprécier du fait de la récurrence et de l’importance du déficit commercial américain, de l’endettement des ménages... Derrière ces prophéties, il y a le vil espoir, pour certains analystes, de voir l’Empire imploser, de voir le règne des Etats-Unis s’achever.


LA FIN D’UNE EPOQUE

La baisse du dollar, une vieille histoire…

Tout a commencé il y a plus de quarante ans avec les eurodollars, avec l’apparition des premiers déficits commerciaux. La remise en cause de la convertibilité en or en 1971, puis la fin du système de Bretton Woods en 1976 auraient signé l’arrêt de mort du dollar. Son appréciation dans les années quatre-vingt et dans les années 2000 ne constituerait que des rémissions.

La tendance de fond serait la baisse. L’accumulation des déficits commerciaux et donc des créances de l’étranger sur les Etats-Unis ne peuvent que conduire à l’affaiblissement du dollar. Dans un souci de diversification des risques, les investisseurs vendent des titres en dollars d’autant plus que la Chine, l’Inde et quelques autres pays entrent dans le club des grandes puissances. L’ère des Etats-Unis, l’unique puissance, serait entrain de s’achever.

Taux de change euro/dollar
1999-2006


Des rémissions artificielles ou conjoncturelles

Sous Reagan, l’envolée du dollar est la conséquence d’une hausse sans précédent des taux d’intérêt et d’une volonté de la FED de casser toutes les anticipations inflationnistes. La dernière rémission, au début de la décennie, s’explique tout à la fois par le différentiel de taux et de croissance en faveur des Etats-Unis ainsi que par un contexte international troublé. Les attentats du 11 septembre 2001, la guerre en Afghanistan puis en Irak ont dans un premier temps redonné au dollar son image de valeur refuge du monde libre. L’euro est alors tombé alors à moins de 0,84 dollar. L’enlisement irakien et afghan joue aujourd’hui en sens inverse. Depuis deux ans, l’euro évolue entre 1,20 et 1,35 dollar. Il convient de constater que les évolutions de la dernière décennie sont moins prononcées que celles des années soixante-dix et quatre-vingt. De 1976 à 1981, le dollar était passé de 4 francs à 10 francs. En convertissant les cours actuels, le dollar est passé de 7,28 francs en 2001 à 4,85 francs en décembre 2006.

Sur longue période (schéma 2), la parité euro/dollar apparaît relativement stable surtout si on la compare avec celle euro/yuan.

Les Etats-Unis n’ont pas la culture de la monnaie forte à la différence des Allemands et des Anglais voire des Français (même si l’application de ce principe n’a jamais été aisée en France). Les autorités américaines ont une vision utilitariste, pragmatique de leur monnaie. De l’époque de la conquête de l’Ouest au New Deal, la politique monétaire est avant tout une politique destinée à favoriser la croissance.

Taux de change euro/dollar et euro/Yuan
1985-2005


La chronique annoncée de la fin de l’hyper-puissance américaine

Toujours plus de dépenses militaires et toujours plus d’impopularité

Tout empire meurt de sa puissance. Tout empire périclite par l’obligation constante de défendre ses frontières qu’elles soient territoriales ou économiques. L’Empire est forcé pour maintenir ses positions d’accroître ses dépenses militaires et d’être présent sur un nombre important de théâtres ce qui ne peut aboutir qu’à accroitre son impopularité et renforcer ses adversaires. De ce fait, le coût croissant des dépenses de sécurité intérieure et extérieure obère les capacités de développement et de renouvellement des grandes puissances. En 2005, les Etats-Unis ont consacré 4,06 % du PIB à la défense nationale contre 1 % pour l’Europe. En cinq and, ce budget a augmenté de 34 %. Plus de 500 000 soldats américains participent à des opérations extérieures sur tous les continents.



Le déclin de l’économie US

Le modèle américain repose sur une énergie abondante, sur une main d’œuvre en croissance et avide de biens de consommation et également sur la maîtrise de l’innovation. Or, ce modèle s’effrite. Le temps de l’énergie bon marché s’évanouit ; les Etats-Unis sont confrontés comme les autres pays occidentaux au vieillissement de la population et la recherche n’échappe pas à la mondialisation. Les avantages comparatifs des Etats-Unis disparaissent ou s’atténuent. Ainsi, il est écrit que compte tenu des tendances constatées depuis près de dix ans, le PIB de la Chine sera supérieur à celui des Etats-Unis en 2040.

La fin de l’industrie automobile américaine

Les big three ont été longtemps les porte-drapeaux de l’industrie américaine. Leur chute marque l’affaiblissement de l’économie des Etats-Unis. Chrysler a été racheté par la firme allemande Mercedes. Ford et GM ont été dépassés par Toyota et luttent pour leur survie. La crise de l’automobile imputable à une non prise en compte des besoins des consommateurs et au coût exorbitant des régimes de retraite maison. La première industrie est menacée par le système social, ironie de l’histoire pour le pays du capitalisme roi.

La Silicon Valley en voie d’être dépassée

Le renouveau de l’économie américaine depuis un quart de siècle est lié à l’essor de l’informatique, à Internet et à la puissance des entreprises créatrices de symboles appartenant à l’industrie cinématographique ou plus globalement au secteur des médias. Mais même sur ces secteurs, la suprématie américaine s’effrite. Sony a racheté les studios Columbia et le Français, Vivendi, les studios Universal. IBM, HP et les grandes marques historiques de l’informatique reculent et sont contraintes de se restructurer, de passer des alliances ou de réaliser des fusions avec des entreprises européennes ou asiatiques.

Internet n’échappe pas à la règle. Certains experts mentionnent que ce secteur est arrivé à maturité, que sa capacité à dégager des gains de productivité s’affaiblit. Le développement du gratuit sur le net remet en cause la domination des entreprises américaines comme Microsoft. Le succès de Google cacherait un épuisement du modèle de la startup californienne reposant sur une synergie avec les centres de recherche universitaires. Il y a maintenant plus d’abonnés à Internet en Chine qu’aux Etats-Unis ; après les centres d’appels, ce sont les laboratoires de conception des logiciels qui migrent en Inde et en Chine.

Recherche, la suprématie américaine contestée

Cette année, pour la première fois, la Chine investira plus en recherche-développement (R-D) que le Japon et deviendra, par conséquent, le deuxième investisseur mondial dans ce domaine, derrière les États-Unis. En Chine, le nombre de chercheurs a augmenté de 77 % entre 1995 et 2004. Avec 926 000 chercheurs, le pays se classe désormais au deuxième rang, juste derrière les Etats-Unis (plus de 1.3 million).

Le nombre total de brevets d’importance mondiale provenant des économies non membres de l’OCDE est faible comparé au nombre total pour la zone OCDE mais les chiffres ont augmenté rapidement ces dernières années. En 1991, l’Afrique du Sud, le Brésil, la Chine et l’Inde représentaient 0.15 % du total. En 2002, cette part était passée à 0.58 % du total.

Le gouffre du déficit commercial

Le déficit commercial américain représente 7,1 % du PIB des Etats-Unis. Les économistes font remarquer l'ampleur encore considérable du déficit commercial américain. Sur les neuf premiers mois, il s'élève à 586,2 milliards de dollars, contre 522 milliards sur la même période de 2005, année durant laquelle il avait atteint le niveau inégalé de 723,6 milliards de dollars

L’économie américaine est dopée aux capitaux étrangers ; or pour les attirer, les entreprises d’outre-Atlantique sont dans l’obligation d’offrir des rentabilités élevées ce qui obère le futur.

Les Etats-Unis vivent sur une montagne de dettes. Les engagements en matière de retraite, en matière d’immobilier, les créances détenues par les investisseurs étrangers sont autant de faiblesses. Depuis 2002, la valeur des actifs américains ont perdu près du tiers de leur valeur même si cette perte est relative du fait du rôle du dollar et que de nombreuses monnaies dont en Asie lui sont attachées.

La tentation protectionniste comme aveu de faiblesse et de repli

Cette tentation n’est pas nouvelle. L’isolationnisme est une tradition aux Etats-Unis. La victoire des démocrates aux midterms en novembre 2006 est perçue comme un signe en faveur du protectionnisme d’autant plus que la prochaine élection présidentielle est incertaine. Jusqu’aux élections de 2008, la politique commerciale américaine sera certainement plus dure. Le refus d’ouvrir les liaisons aériennes transatlantiques à la concurrence en est la preuve. En outre, les Etats-Unis sont tentés de s’enfermer, de construire des murs à leur frontière tout comme

De toute façon, le monde n’appartient plus aux Américains

L’influence des Etats-Unis persiste mais le capital ne leur appartient plus. L’accumulation des déficits a pour conséquence un flux ininterrompu de dollars au profit de non-résidents. Avec ces dollars, ils ont acquis des actifs aux Etats-Unis et ailleurs. La dollar reste la monnaie des échanges internationaux ; mais à terme dans un système multipolaire, d’autres monnaies pourraient concurrencer la monnaie américaine comme l’euro ou le yuan.










Avoirs extérieurs nets des États-Unis
En pourcentage du PIB

Source OCDE


Les anticipations de taux et de croissance favorisent la baisse

A moyen terme, l'affaiblissement du dollar s'explique par les mouvements de taux d'intérêt. La Fed américaine a monté 17 fois depuis juin 2004 son taux directeur, le portant à 5,25 %, mais elle a cessé de le faire depuis six mois ; les analystes s'attendent maintenant à ce qu'elle l'abaisse. Inversement, la BCE est encore en période de resserrement ; elle a porté son taux à 3,50 % le jeudi 7 décembre 2006 et devrait encore le remonter encore deux fois en 2007. L’argent devient moins intéressant aux Etats-Unis d’autant plus que la croissance se dégrade, obligeant la FED à relancer l’économie.

L’OFCE prévoit un taux de croissance pour les Etats-Unis, en 2007, de 1,9 % contre 3,2 % cette année. Cette réduction serait imputable au retournement du marché immobilier. Depuis plus d’un an, tous les indicateurs de ce marché signalent un net repli (mises en chantier, achats, investissement dans les logements). Or, dans un pays fonctionnant sur l’endettement et le changement fréquent de logement pour dégager des plus-values, une correction sur le marché immobilier a toujours de lourdes conséquences sur l’ensemble de l’économie. Deux tiers des Américains sont propriétaires et les plus-values réalisées sur l’immobilier ont assuré 60 % de l’enrichissement de ces vingt dernières années.

Les Américains, dans leur ensemble, sont favorables, jusqu’à maintenant, au processus de mondialisation. Le plein emploi quasi permanent depuis vingt ans et la mobilité sociale comme géographique de la population contribuent à limiter les effets de ce processus. Il en serait tout autre si le marché de l’emploi se dégradait. Les résurgences chroniques du protectionnisme témoignent qu’en la matière rien n’est pas figée. Il y a eu la menace nippone, désormais la menace est chinoise. De nombreux ouvrages soulignent que le conflit entre les deux pays est inscrit à plus ou moins long terme.






La menace de la résurgence de l’inflation

Depuis un an, l’inflation américaine s’établit à près de 4 %, l’inflation sous-jacente s’établit désormais à 2,8 % contre 2 % marquant l’amorçage d’un processus de hausse des prix indépendant de l’effet pétrole et matières premières.

Cette menace est exagérée ; le ralentissement annoncé de l’économie américaine devrait freiner les hausses de prix d’autant plus si le retournement du marché immobilier se confirme. Le pétrole dont l’impact sur l’économie américaine est supérieur à celui sur les économies européennes moins dépendante de l’énergie devrait se stabiliser. Les cours actuels, autour de 60 dollars le baril, sont inférieurs à ceux enregistrés lors du second choc pétrolier et semblent se stabiliser.






Les faiblesses réelles ou supposées des Etats-Unis ne sauraient masquer la capacité de rebond de ce pays

Tout empire est mortel, un jour ou l’autre, les pourfendeurs de l’économie américaine auront raison ; la question, c’est quand ? Malgré l’apparition de nouvelles puissances économiques, les Etats-Unis maintiennent leur rang. De 1980 à 2006, la part du PIB américain dans le PIB mondial reste à 21 % alors que celui de l’Union européenne est passé de 28 à 20 %. Les Etats-Unis représentent un marché de 300 millions d’habitants qui s’accroît du fait d’une natalité dynamique et d’une immigration légale et illégale forte à la différence de la Russie, de l’Union européenne. Selon le dernier classement de l’OCDE (décembre 2006), 22 des 25 villes les plus compétitives et les plus riches (PIB par habitant) se situent aux Etats-Unis

L’enlisement de la guerre en Irak rappelle la guerre du Vietnam. Malgré sa supériorité technologique, l’armée américaine est incapable, car tel n’est pas son métier, de gérer la paix et de reconstruire un pays. Une armée n’arrivant pas à partir au bout de quelques mois d’occupation est vouée à connaître des actes de terrorisme et l’impopularité dans la population civile. Du Vietnam à l’Irak en passant par l’Algérie ou l’Afghanistan, toutes les grandes puissances ont été confrontées à ce problème. Certains économistes par parallélisme avec la guerre du Vietnam pronostique le retour de l’inflation. En l’état actuel, cette crainte est exagérée. La disparition du système de change fixe et surtout la concurrence sur l’offre limitent la résurgence d’une vague inflationniste. Le protectionnisme et une chute incontrôlée de la monnaie américaine pourraient occasionner un emballement des prix mais nul n’y a intérêt. Dans un système multipolaire, les intérêts croisés des acteurs constituent autant de garde-barrières.

Les gisements de puissance

Le déclin avait été annoncé dans les années soixante. Les présidences Ford et Carter semblèrent donner raison aux partisans de cette thèse. Des experts, surtout en France, affirmaient même que le modèle soviétique pourrait l’emporter. Or, en quelques années, les Etats-Unis ont réussi à réaffirmer leur leadership et ont provoqué indirectement la chute de l’URSS et de ses satellites.

Les Etats-Unis restent le centre du monde par leur capacité d’attirer les cerveaux de la planète. Deux tiers des diplômés en sciences et en ingénierie aux Etats-Unis sont d’origine asiatique.

La croissance repose, de plus en plus, sur l’immatériel et sur la valorisation des résultats de la recherche. Les Etats-Unis ne seront plus l’atelier du monde ; ils seront le centre de recherche de la planète. Les droits de propriétés, les brevets, les licences remplacent les automobiles, l’acier, les ordinateurs.

Le pragmatisme et l’adaptabilité constituent les deux grandes forces des Etats-Unis

La force du capitalisme américain provient de sa capacité à s’adapter et à se renouveler rapidement. Du fait de la taille du pays, de la mobilité de la population, les reconversions apparaissent plus faciles qu’en Europe. Le déclin de la sidérurgie n’a pas laissé d’aussi vives traces qu’en France, au Royaume-Uni ou qu’en Allemagne. Même si l’automobile est un des éléments constitutifs de l’American way of life. Symbole social, symbole de liberté, incontournable pour les Américains, ils n’ont, malgré les tentations protectionnistes, pas hésité à acheter en masse des voitures asiatiques, moins chères et plus perfectionnées.

Cette capacité d’adaptation se manifeste même dans le secteur de l’énergie ; en 2006, l’économie américaine consomme deux fois moins de pétrole par unité produite qu’en 1985, soit une décrue plus rapide qu’en Europe.

Pour la communication, La force des Etats-Unis est de contrôler l’ensemble de la chaine. Au 19ème siècle, les Anglais dominaient les mers et le commerce àtravers la possession de quelques ports et d’une flotte de bateaux. L’important n’était pas la nationalité de la marchandise mais bien leur commerce. Aujourd’hui, les ordinateurs sont made in China ou Taiwan ou South Korea ; en revanche Google, Ebay ou Google sont incontournables. Certes, l’avènement de la Chine et de l’Inde comme puissance économique, du fait de la taille de leur marché domestique, peut modifier à terme la donne. Il n’en reste pas moins que la langue anglaise est et sera, encore, pour de nombreuses années la langue des affaires. L’absence d’unité linguistique en Chine et la difficulté d’apprentissage du mandarin, la langue la plus parlée au monde, offre à l’Anglais un avantage indéniable.

Le centre mondial de la recherche

Les dépenses d’enseignement supérieur, de recherche et d’informatique atteignent 6,5 % du PIB aux Etats-Unis contre 3,8 % en France et 4 % dans l’Union européenne.

400 000 chercheurs européens travaillent aux Etats-Unis alors que l’Union européenne en compte que 920 000 réalisant que 40 % de la Recherche Développement américain.

Les Etats-Unis accueillent 70 % des prix Nobel, assurent 44 % de la production d’articles scientifiques et déposent 36 % des brevets mondiaux. Le budget fédéral américain consacre plus de 110 milliards de dollars à la recherche contre 54 milliards pour les Etats de l’Union européenne.

Au cœur des nouveaux business ou des business porteurs

En 2006, les activités sur Internet représenteront 4000 milliards de dollars dont la moitié réalisée aux Etats-Unis.

Le secteur de l’assurance et de la couverture de risques atteint plus de 10 % du PIB aux Etats-Unis. La sphère financière américaine, du fait de la vitalité de New York, reste la première du monde.

Au début des années 2000, Boeing apparaissait face à Airbus sur le déclin ; sept ans plus tard, c’est l’inverse. La société aéronautique américaine a réussi à remettre à plat l’ensemble de son processus de production en utilisant des techniques de pointe. Le Dreamliner a des chances d’être l’avion de la prochaine décennie comme l’A320 l’a été pour la décennie actuelle.

La balance des paiements courants est-elle un indicateur pertinent ?

Dans une économie mondialisée, avec libre circulation des biens, des services et des capitaux ainsi que dans un système de change flexible, la balance des paiements courants n’est-il pas un indicateur en perte de vitesse ? Tous les professeurs d’économie apprennent à leurs étudiants qu’elle ne permet pas à expliquer à elle seule les variations des taux de change. Il ne faut pas perdre de vue que l’importation et l’exportation de biens ne représentent qu’une partie de plus en plus faible des échanges au niveau mondial. Les échanges financiers, de service ont constituent des taux de croissance supérieurs à ceux de biens matériels. Ce qui est important, c’est la capacité des acteurs économiques à acquérir des biens et des services quelles que soient leur origine. Le déficit commercial américain est avant tout un problème d’emploi. Il traduit le recul de l’industrie en particulier automobile.

La balance courante américaine est structurellement déficitaire comme en témoigne le graphique ci-dessous, depuis 25 ans. Elle n’a dégagé d’importants excédents que durant les deux conflits mondiaux.




La balance courante américaine en perspective historique
En pourcentage du PIB/PNB


Un déficit commercial est supportable à la condition qu’il soit porté par un fort taux de croissance, la création de richesses permettant d’acquérir des biens et des services à l’étranger, cette croissance permettant ; par ailleurs d’attirer les capitaux extérieurs indispensables pour l’investissement dans les secteurs porteurs. Un déficit commercial n’est pas synonyme d’appauvrissement s’il offre des gains de productivité et de pouvoir d’achat à une économie. Le problème est autre si un déficit commercial intervient en période de faible croissance, de sous-investissement. Par exemple, le déficit français n’est pas, en revanche, générateur de croissance ; les sorties de capitaux sont, en outre, supérieures aux entrées.

Les Etats-Unis se caractérisent depuis plus de vingt ans par un taux de croissance supérieur à la moyenne de l’OCDE et par un taux de chômage faible. Le déficit commercial est un élément clef du renouveau américain. Ils n’ont pas du fait du rôle de leur monnaie, connu de contrainte de change. C’est le droit de seigneuriage propre aux grandes puissances. Les Etats-Unis assurent des missions de sécurité dont profitent toutes les nations. Cette sécurité a un prix.

La vague chinoise n’est pas éternelle

Les importations chinoises sont avant tout responsables du déficit commercial américain. Le débat dans les prochains mois portera sur la valeur du Yuan sous-évalué. Il faut souligner qu’il est assez paradoxal que la Chine, nouvelle puissance capitaliste se développe tout en conservant certains principes de l’économie dirigée. Membre de l’OMC, sa monnaie n’est pas convertible. A terme, l’enrichissement à grande vitesse de la Chine devrait aboutir à un rééquilibrage de la balance commerciale.

Les modèles, en particulier ceux de l’OCDE, démontrent que le rééquilibrage de la balance commerciale supposerait un choc de change de très grande ampleur avec des conséquences difficiles à mesurer sur l’ensemble de l’économie mondiale.

Une monnaie faible n’est pas une garantie de rééquilibrage des échanges. En effet, il suffit de constater que le deutschemark et l’euro fort n’ont jamais empêché l’Allemagne d’accumuler les excédents commerciaux. L’appréciation d’une monnaie offre de nombreux avantages à une économie à condition que son positionnement soit en phase avec la demande mondiale. Le déficit commercial américain étant essentiellement de nature structurelle, la dépréciation du dollar aura, de toute façon, qu’un effet limité et passager.

Une baisse du dollar pourrait, de plus, conduire la FED à relever les taux d’intérêt pour empêcher tout dérapage des prix ce qui limiterait certes la croissance mais aussi la dépréciation du dollar. Le dilemme des autorités monétaires américaines est tout à la fois d’assurer la croissance, de maintenir le plein emploi et de lutter contre l’inflation.

Qui a intérêt à la baisse du dollar ?

La baisse du dollar a pour objectif de réduire le déficit commercial et d’améliorer la compétitivité américaine.

Une baisse trop forte du dollar remettrait en cause le développement même des Etats-Unis. En effet, une dépréciation de la monnaie aboutit à une diminution de valeur des actifs, des biens. Certes, le dollar restant l’étalon monétaire de référence, ce risque est limité d’autant plus que la taille du marché intérieur en réduit, par ailleurs, les effets. Il n’en demeure pas moins que si les Etats-Unis ont pu connaître de si longs cycles de croissance depuis vingt cinq ans, c’est en grande partie par leur capacité à attirer des capitaux d’origine étrangère. Les investisseurs étrangers cherchent à obtenir les meilleurs rendements possibles avec un risque réduit sur leur capital. Le taux de croissance potentiel des Etats-Unis, autour de 3 %, leur offrait un rendement correct ; le dollar monnaie de réserve était par ailleurs une garantie. La glissade du dollar modifierait la situation ; les investisseurs pourraient rechercher des placements plus sûrs ou plus rémunérateurs. Actuellement, il y a peu de pays offrant rendement et sécurité. La Chine, l’Inde, la Russie peuvent offrir du rendement mais pas la sécurité ; la vieille Europe peut offrir de la sécurité mais de rendement ; en outre aucun pays n’a la surface économique des Etats-Unis.

Une déstabilisation de l’économie mondiale par une chute du dollar se retournerait contre les exportations américaines qui en cas de baisse de la croissance mondiale ne trouveraient plus preneurs.

La conjonction de ces données a pour conséquence que tous les acteurs ont intérêt à maintenir à un niveau correct le dollar faute de solution de remplacement.

L’euro s’apprécie au point de gêner les exportations des pays européens. Cette appréciation ne couronne pas le succès des économies du vieux continent qui se battent pour dépasser les 2 % de taux de croissance ; elle est la traduction d’une politique monétaire dont la pierre angulaire est la lutte contre l’inflation. La Banque Centrale Européenne relève ces taux depuis un an pour empêcher toute résurgence de hausse des prix alors qu’aucun signe en ce sens n’est visible. La brusque envolée des cours des matières premières n’a pas eu de conséquences du fait non pas de la politique mise en œuvre mais du fait de la concurrence mondiale et de la moindre dépendance de l’économie moderne aux matières premières. Si aux Etats-Unis, la FED joue sur les taux afin de réguler une forte croissance, la Banque Centrale Européenne reste prisonnière d’un schéma dépassé. L’appréciation de l’euro est donc en partie artificielle. Elle rappelle les politiques menées dans les années trente en Grande Bretagne et en France qui visaient à maintenir la parité de la livre sterling et du franc au prix d’une récession. La politique de désinflation engagée depuis près de vingt ans en Europe a asséché non seulement l’inflation qui a disparu ou presque disparu de tous les pays mais aussi la croissance. Elle a renchéri le coût de l’endettement qui est de nature de plus en plus publique. Si outre-Atlantique, l’investisseur privilégie les placements productifs, il opte pour des obligations d’Etat en Europe.

Les investisseurs n’ont donc aucun intérêt à vendre massivement leurs actifs investis en dollar faute d’alternative. Il peut y avoir rééquilibrage mais certainement pas une révolution dans les politiques d’allocation des actifs.

Les investisseurs chinois et asiatiques ne joueraient-ils pas à la roulette russe en vendant leurs valeurs américaines au profit de placements dans leur pays d’origine. En effet, la croissance chinoise n’est pas à l’abri d’un choc comme nous en avons connu en Asie en 1997. Par ailleurs, la coexistence du communisme et du capitalisme est une source d’incertitudes ; de même l’instabilité diplomatique avec la Corée du Nord ou le problème de la Mongolie constitue autant de raisons de ne pas se dessaisir des placements américains. Enfin, le marché américain est et restera longtemps un des principaux débouchés pour les usines de l’Asie. Arrêter d’alimenter en capitaux les Etats-Unis aurait pour conséquence un ralentissement de l’économie de la Chine qui même si les leçons de la crise bancaire de 1997 ont été retenues fonctionne selon le principe du vélo cher au Timonier, « tout arrêt entraîne la chute ».

Certes, le comportement des acteurs n’est jamais rationnel et surtout la somme de comportements logiques peut aboutir à une situation illogique et dangereuse.

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La baisse du dollar est liée aux incertitudes qui pèsent tant sur la politique monétaire et la politique économique des Etats-Unis. Le ralentissement de la croissance annoncé devrait conduire la Fed à réduire ses taux qui sont aujourd’hui élevés ; en revanche, les menaces inflationnistes pourraient conduire la FED à les relever. A cette incertitude s’ajoute l’Irak et l’élection présidentielle de 2008. A deux ans de l’élection, nul ne peut prévoir de manière certaine qui sera candidat tant chez les Démocrates que chez les Républicains. Hilary Clinton peut être considérée comme favorite ce qui n’est pas obligatoirement un atout tout comme la récente victoire des Démocrates au Congrès. Jusqu’à la fin de l’année 2007 ou du moins jusqu’au milieu de l’année, la situation politique américaine restera assez confuse. Cette accumulation d’incertitudes contribue sans nul doute à l’affaiblissement du dollar mais non à pronostiquer une chute abyssale d’autant plus que plus les autorités chinoises auront à cœur de réussir 2008, l’année des Jeux Olympiques, et accepteront peut-être une appréciation de leur monnaie

mardi 9 janvier 2007

Quel avenir pour le PERP

Le Plan d’Epargne Retraite Populaire est un des deux produits créés par la loi Fillon de 2003. Produit d’épargne individuel, il s’adresse avant tout aux salariés qui, jusqu’à maintenant, ne bénéficiaient pas d’un régime fiscal incitatif permettant la constitution d’un supplément de revenu par capitalisation. Le Cercle des Epargnants a réalisé avec l’appui de son Observatoire de l’Epargne Retraite qu’il a créé avec le CECOP dirigé par Jérôme Jaffré et l’IFOP un premier bilan du PERP



Le PERP, après des début prometteurs, marque le pas. Critiqué du fait de sa sortie en rente, de sa complexité, le PERP éprouve des difficultés à trouver sa place dans le paysage français de l’épargne.

Le PERP souffre d’un problème d’identité.

Le PERP n’est connu que par 42 % des Français et seulement 13 % d’entre eux ont l’intention d’en souscrire un dans l’année qui vient. Pour 54 % des Français, le manque d’information explique leur faible engouement pour ce produit. Il doute de son efficacité et de son utilité pour préparer la retraite (49 % des citations. L’obligation de sortie en rente souvent perçue comme le principal handicap n’est citée que par 9 % des sondés. Néanmoins, il faut souligner que pour les revenus supérieurs à 3500 euros mensuels et disposant d’un patrimoine financier supérieur à 10 000 euros, l’aliénation du capital constitue une véritable contrainte.

Le PERP est, de ce fait, un produit qui a été souscrit par un public plus jeune et plus modeste que prévu. L’âge moyen est de 38 ans. Il en résulte que le montant des primes versées est faible.

Les PERP souscrits le sont avant tout en fonds euros et intègrent peu d’unités de comptes ; la part action et private-equity y est très faible. Le nombre limité de souscription n’incite guère les professionnels à proposer des fonds innovants et risqués dans le cadre de la gestion d’actifs.

En l’état actuel, le PERP n’est plus un produit « tête de gondole » pour les banques et les assurances compte tenu de sa faible rentabilité liée à des coûts de gestion élevés et à une collecte faible.

Récapitulatif du nombre de PERP distribués

Au 31 décembre 2005 :

Ø 1,7 million de PERP souscrits (1,4 million fin 2004)
Ø 1,3 milliard d’euros d’encours (500 millions d’euros fin 2004)
Ø 80 % des versements sur des supports euros

47 % des souscripteurs ont moins de 40 ans.




Répartition selon l’âge

Age de souscription d’un PERP
En % du total
Moins de 30 ans
19 %
De 30 à 39 ans
28 %
De 40 à 49 ans
31 %
De 50 à 59 ans
21 %
Plus de 60 ans
1 %
Source FFSSA

Mode de distribution des PERP :

Ø 81 % en réseau bancaire (fin 2004 : 86 %)
Ø 19 % en réseau assurance (fin 2004 : 14 %)

Les banques ont, la première année, capté le marché du fait d’une politique commerciale agressive qui a abouti à la signature de PERP de circonstances. Il en résulte des primes mensuelles versées faibles et un risque de désilluion inversement proportionnel. Les primes versées sur les PERP des assureurs sont en moyenne deux fois plus élevées que pour ceux des banques.

Répartition selon le montant d’encours

Moins de 500 euros
85 %
De 500 à 1000
8 %
De 1000 à 2000
3 %
De 2000 à 5000
3 %
Plus de 5000
1 %
Chiffres FFSA

PERP/Madelin, même combat

Le lancement des contrats Madelin qui offrent des couvertures retraite et prévoyance pour les indépendants et professions libérales avait

rencontré un scepticisme identique à celui qui a cours actuellement pour le PERP. Or, après deux ou trois années difficile, les contrats Madelin ont rencontré un véritable succès.

taux de détention du PERP et du Madelin


Madelin
PERP
1ère année
7%
5 à 7%
2ème année
10 %
7 à 10 %
10 ans après
40 %

Pour le PERP : base salariés ; pour le Madelin : base indépendants/professions libérales ; chiffres FFSA

Le PERP, un produit qui répond à un réel besoin

L’avenir du système des retraites avec l’emploi et la santé constitue un des grands pôles d’inquiétude des Français. Le taux d’inquiétude est inversement proportionnel au salaire perçu ; par ailleurs, ce sont les plus jeunes qui sont les plus inquiets.

Cette anxiété ne conduit pas pour le moment à une recherche d’informations et de solutions. Trois quarts des Français non-retraités n’ont pas une vision claire de leurs retraite et ce taux monte à 83 % pour les 30/44 ans.

L’étude du Cercle des Epargnants réalisée par l’IFOP et le CECOP indique en effet que 62 % des Français sont favorables à un système mixte. Il n’y a pas sur ce sujet de clivage politique. 62 % des sympathisants de gauche et 66 % des sympathisants de droite souhaitent le développement d’un système reposant à la fois sur la répartition et sur la capitalisation.